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Lectures de Lounima
18 septembre 2011

Claire Ubac - Le chemin de Sarasvati

Claire_Ubac
Éditions : Médium/L'école des loisirs - Nombre de pages: 282

4ème de couverture :
Les filles ? Des êtres stupides. Des bouches inutiles à nourrir. Les marier ? La dot coûte cher. Mieux vaut les tuer dans l'œuf.
Les intouchables, les "hors castes" ? Des parasites. Bons à rien. Arriérés. Condamnés aux basses besognes. Il faut les fuir à tout prix.
Dans l'Inde de tous les possibles, mais aussi des préjugés tenaces, les routes de deux parias se croisent.
Elle, Isaï, était venue en cachette assister aux funérailles de sa mère. Lui, Murugan, d'un geste respectueux, a replacé une fleur tombée du brancard. Leur premier dialogue s'est fait en rythme et en musique. Chanter, jouer, ils en rêvent tous les deux. Ils osent partir.
Leur traversée du pays sera semée d'embûches et de mauvaises rencontres.
Mais Sarasvati, la déesse au luth, veille sur eux.

durga_foyerMon avis :
"C'est un des premiers jours de ma vie; je n'ai pas encore de nom. Ma mère me donne le sein dans la cour, à l'ombre du manguier. Ses bras se crispent autour de moi. Ma tante vient de sortir de la maison; elle fouille la cour des yeux, les paupières plissées sous le soleil cru du printemps.
Ma mère implore en pensée la déesse du Foyer: "Durga, ne la laisse pas s'approcher !"
Mais la grande femme sèche se dirige déjà vers nous. Sans se donner la peine de s'accroupir, elle crie à sa belle-soeur :
- Femme de Meyyan !
Ces mots sonnent avec dédain. Ma tante, exprès, n'appelle jamais ma mère "petite soeur", comme c'est l'usage.
- Femme de Meyyan, qu'est-ce que tu es en train de faire ?
Elle siffle entre ses dents :
- Tu sais pourtant qu'il faut la laisser mourir de faim, cette merde que tu as pondue !" (Médium/L'école des loisirs - p.11)
Sud de l'Inde, état du Tamil Nadu. Isaï naît dans une famille pauvre où naître fille est une misère... Cependant, malgré l'absence de son père parti chercher du travail à la ville et la haine de sa tante qui souhaite rien de moins que sa mort, Isaï grandit dans l'amour de sa mère, Dayita, qui la protège et lui enseigne tout ce qu'elle sait : lire, parler l'hindi (en plus du Tamoul, la langue du Tamil Nadu), chanter... Ensemble, elles prient les dieux hindous afin qu'ils les protègent, particulièrement la déesse Sarasvati, déesse des Arts, qui semble avoir comblé Isaï de dons exceptionnels pour le chant.
Isaï a 10 ans lorsque sa mère meurt, la laissant seule pour affronter sa venimeuse tante cobra... Au cours de la crémation de sa mère, elle aperçoit un "opprimé", un hors-caste, qui ramasse respectueusement une fleur tombée du lit funéraire. Plus tard, alors que sa tante lui a rasé le crane sous un prétexte quelconque, elle devient son amie, se faisant passer pour un garçon. Mais tante cobra n'a pas fini de torturer Isaï et, pour rembourser l'emprunt du mariage de son fils, elle décide d'envoyer sa nièce travailler en ville chez un usurier ! Isaï y voit l'occasion de s'enfuir à Bombay où son père travaille... Elle réussit grâce à Murugan, le hors-caste devenu son ami qui, lui aussi souhaite tenter sa chance à la ville et n'accepte pas que les intouchables comme lui soient considérés comme des arriérés !
Les deux enfants partent donc vers Bombay sous l'aile bienveillante de Sarasvati, et leur route, semée d’embûches, leur dévoile l'Inde : unique, multiple, complexe, pauvre et belle !

Shiva_createurC'est un voyage très instructif à travers l'Inde que nous propose Claire Ubac avec ce roman.
C'est tout d'abord un voyage géographique (si j'ose dire) à travers l'Inde et un dépaysement garanti avec les nombreuses descriptions des villes et villages traversés par nos deux jeunes protagonistes... Ainsi, débuté à Yamapuram dans l'état du Tamil Nadu dans le sud est de l'Inde, le périple d'Isaï et Murugan nous conduit à Madurai, puis à Kanyakumari, puis à Mysore dans l'état du Karnataka, puis à Bangalore, puis à Hampi pour finalement nous déposer à Bombay, capitale de l'état du Maharashtra, au centre ouest de l'Inde... de quoi découvrir de multiples paysages !
C'est ensuite un voyage spirituel avec l'évocation d'une panoplie de dieux et déesses hindous vénérés par nos deux jeunes héros qui ne manquent jamais d'aller faire leur puja dans les temples des lieux qu'ils traversent. Nous faisons ainsi la connaissance de Durga, Shiva, Kali, Parvati, Ganesh (Ganapati), Sarasvati, Lakchmi, et j'en oublie sans doute...
C'est aussi un voyage culturel avec l'évocation du cinéma bollywoodien, les odeurs de nourriture (barfis, samosas, payasam, chapatis, etc...), la description de quelques coutumes (les kolams par exemple dont je vous ai déjà parlés ici), les nombreux vêtements typiques, et, bien entendu, la musique !
C'est enfin un voyage social, bien ancré dans la réalité et donc bien difficile à supporter parfois : situation inacceptable des femmes, sort des intouchables, extrême pauvreté dans les villages obligeant les hommes de la maisonnée à s'exiler dans les villes afin de nourrir leur famille, extrême pauvreté encore fabriquant des cohortes d'enfants des rues fouillant les poubelles pour survivre,... autant de vérités crues que le cinéma bollywoodien souhaiterait parfois nous faire oublier.

Ainsi, ce roman permet aux lecteurs de découvrir de multiples facettes de l'Inde moderne et, en cela, il est très intéressant mais cela a-t-il été suffisant pour me plaire totalement ? Malheureusement non ! En effet, plutôt destiné aux adolescents, j'ai trouvé ce livre, certes frais, mais beaucoup trop naïf et le happy end est beaucoup trop "happy" à mon sens (je ne dévoile rien mais bon, c'est un peu too much...) ;-) Après la lecture de ce livre, je sais pourquoi je ne lis que très rarement des romans destinés à la jeunesse... ;-)

Morceau choisi : La magie du cinéma...
"Et soudain, chaque matin, je me retrouve dans le noir, plongée dans l'émerveillement! Certains films sont en tamoul, d'autres en hindi. Pour la première fois, j'entends d'autres femmes parler la langue de ma mère. Et quelles femmes! Toutes des beautés, en sari de soie aux couleurs exquises, subtilement maquillées, couvertes de bijoux étincelants. Elles chantent et dansent à ravir - de façon souvent provocante, il faut l'avouer - et séduisent des hommes taillés dans la même étoffe de lumière. J'en ai le souffle coupé! (Médium/L'école des loisirs - p.91)

Un conte de fée qui réjouira les adolescents et les "grands enfants" ! ;-)

Plaisir de lecture : lecture_notation1_30lecture_notation1_30lecture_notation05_30lecture_notation0_30lecture_notation0_30

D'autres avis : Hilde, Soukee.

Lata_MangeshkarLe saviez-vous ?
Dans ce roman, Isaï, la petite fille, est fascinée par la voix d'une chanteuse qui double les actrices de cinéma dans les scènes chantées des films (j'espère que vous ne vous imaginiez pas que les actrices chantaient réellement...). C'est pour moi l'occasion de vous parler de l'une des chanteuses de playback les plus vénérées et respectées actuellement en Inde : Lata Mangeshkar.
Cette chanteuse de playback, née en 1929, a doublé des actrices dans plus de 300 films de 1942 (Kiti Hasaal) à 2006 (Rang De Basanti), principalement en hindi mais également en marathi, sa langue maternelle, en kanada, telugu, bengali, etc. Elle détient le Guiness des records du nombre le plus important d'enregistrements pour une voix (environ 25 000 enregistrements) dans 14 langues indiennes... (source : Wikipedia)

Je vous laisse en compagnie d'une chanson du film Veer-Zaara (Hindi: वीर-ज़ारा, Ourdou: ویر زارا), réalisé par Yash Chopra et sorti en 2004. Dans cette chanson, sont présents  Shahrukh Khan, Preity Zinta, Amitabh Bachchan et Hema Malini. Lata Mangeshkar prête sa voix à Hema Malini, Udit Narayan et Gurdas Mann à Amitabh Bachchan et Shahrukh Khan.


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Commentaires
L
@Lilibook : Ça dépend ce que tu recherches ! Mais, oui, c'est une lecture dépaysante et très instructive... quoiqu'un peu trop naïve à mon goût ! ;-)
L
Ah oui, ça peut être bien comme lecture ! Dépaysante !
L
@Emmyne : Merci Emmyne. <br /> PS : S'il t'intéresse, je peux te le prêter... ;-)<br /> <br /> @Niki : Merci Niki ! Mais, tu sais, je peux vite devenir intarissable (et quelque peu lourdingue aussi) lorsqu'il s'agit de parler de l'Inde... ;-)<br /> <br /> @Edelwe : J'attends ton avis alors ! Bonne lecture... ;-)<br /> <br /> @Agnès : Je dois avouer que Veer-Zaara m'a également fait pleurer comme une madeleine ! ;-) Et il m'arrive aussi d'écouter sa BOF, j'aime beaucoup les chansons particulièrement Do Pal et Tere Liye... et les autres aussi ! :D ;-)
A
Quelle coïncidence ! Je suis justement entrain d'écouter la BOF de Veer-Zaara (film qui m'a fait pleurer comme une madeleine) en lisant ton article !
E
Il est dans ma PAL! On verra bien!
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